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Concours Physique ENS Lyon, Cachan (MP*) 1998 (Énoncé)

ENS 1998 - Physique MP
Formation et structure des étoiles
Les galaxies sont essentiellement constituées d'étoiles, corps gazeux très chauds et très denses et de gaz interstellaire, très froid et très peu dense. Le gaz interstellaire n'est pas uniformément réparti dans les galaxies mais constitue des entités distinctes, appelées nuages. Plusieurs arguments théoriques et observationnels indiquent que les étoiles ont une durée de vie limitée et que de nouvelles étoiles se forment en permanence à partir du gaz interstellaire.
Dans une première partie, nous étudierons un scénario simple d'effondrement gravitationnel d'un nuage interstellaire, qui constitue la base de modèles plus sophistiqués de formation d'étoiles.
La deuxième partie du problème sera consacrée à l'étude de la structure d'équilibre des étoiles telle qu'elle s'établit pendant la plus grande partie de leur vie. Les deux parties du problème et leurs différentes sections sont très largement indépendantes les unes des autres mais il est conseillé de les aborder dans l'ordre de leur présentation.
Une grande attention sera portée aux applications numériques et à leur examen critique, en particulier dans la deuxième partie, lors de laquelle le Soleil sera le plus souvent pris comme exemple. Les unités du système international étant mal adaptées à l'expression des grandeurs astronomiques, nous utiliserons des unités spécifiques de masse, de longueur et de puissance, définies ci-dessous. Nous recommandons d'employer ces unités dans les applications numériques.
Nom Symbole Valeur à utiliser
Masse solaire M 2,0 x 1030 kg
Rayon solaire R 7,0 x l 08 m
Luminosité solaire L 3,8 x 1026 W
Les constantes et les grandeurs physiques fondamentales nécessaires aux applications numériques sont rappelées ci-dessous.
Constante de gravitation G = 6,7 x 10-11 m3 kg-1 s-2
Constante de Planck h = 6,6 x 10-34 J s
Constante de Boltzmann k = 1,4 x 10-23 J K-1
Constante des gaz parfaits R = 8,3 x 10-11 J K-1 mol-1
Constante de Stefan σ = 5,7 x 10-8 Wm-2 K-4
Vitesse de la lumière dans le vide c = 3,0 x 108 m s-1
Masse du proton mp = 1,7 x 10-27 kg
Masse de l'électron me = 9,1 x 10-31 kg
Première partie : Formation des étoiles
On considère un nuage isolé à symétrie sphérique, de rayon R et de masse M. Il est constitué d'hydrogène atomique gazeux, considéré comme un gaz parfait.
1.1 Nuage gravitationnellement lié
Le nuage n'est soumis qu'à sa propre gravité et on néglige pour l'instant toute force de pression interne ou externe.
1.1.1 En raisonnant uniquement sur les dimensions des grandeurs physiques, construire une grandeur homogène à un temps, notée t0, en fonction des seules grandeurs G, M, R..
1.1.2 Exprimer l'énergie potentielle gravitationnelle EP d'un nuage sphérique de rayon R, de masse M et de masse volumique uniforme.
1.1.3 Le nuage, constitué d'atomes d'hydrogène, possède une température cinétique uniforme T. Quelle est son énergie interne U ? A quelle condition sur EP et U le nuage est-il gravitationnellement lié ?
1.1.4 En déduire qu'à masse volumique ρ et température T données, les nuages de rayon inférieur à une limite, appelée rayon de Jeans et notée RJ, que l'on précisera et dont on vérifiera l'homogénéité, se fragmentent.
1.1.5 Application numérique : Calculer le rayon de Jeans RJ et la masse de Jeans MJ correspondante d'un nuage sphérique de température uniforme T = 10 K, comportant 1 atome d'hydrogène par cm3.
1.1.6 Le nuage est découpé en couches sphériques concentriques, considérée chacune comme un système fermé. On s'intéresse au mouvement d'effondrement d'une couche, numérotée i, limitée à l' instant t par les rayons ri(t) et ri(t) + dr et de masse volumique ρi(t). Exprimer la conservation de l'énergie totale de la couche i, dont on supposera la vitesse d effondrement vi(t) nulle à l'instant initial. On pose ri(t) = ri(0) cos2αi(t) et on suppose que l'effondrement se poursuit jusqu'à un rayon nul. En déduire la durée tff d'effondrement, que l'on comparera au temps t0 obtenu en 1.1.1
1.1.7 Application numérique : Quel est le temps d'effondrement tff d'un nuage sphérique, de rayon R = 5 x 109 R, comportant un atome d'hydrogène par cm3 ?
1.2 Stabilité d'un nuage isotherme
On considère un nuage sphérique dont toutes les propriétés (masse volumique, température, pression, champ de vitesses...) possèdent la symétrie sphérique et on ne néglige plus les forces de pression.
1.2.1 En désignant par m(r) la masse contenue à l'intérieur de la sphère de rayon r et par P(r) la pression à la distance r du centre, montrer que la condition d'équilibre de la couche, de masse dm, limitée par les rayons r et r + dr conduit à la relation :
$d(4\pi {r^3}P) = \left( {\frac{{3P}}{r} - \frac{{Gm}}{r}} \right)dm$ (1)
1.2.2 Etablir que 3P/ρ est le double de l'énergie interne du gaz par unité de masse.
1.2.3 Intégrer l'équation (1) sur tout le nuage. En déduire une relation entre P(R) et les énergies interne, U, et potentielle gravitationnelle, EP, du nuage.
1.2.4 Exprimer en fonction de M, T et R la pression de surface P(R) qui assure l'équilibre du nuage et donner l'allure de la courbe P(R) à M et T fixées.
1.2.5 Le nuage, de rayon R, est initialement en équilibre. Que se passe-t-il si la pression externe augmente légèrement ?
1.3 Effondrement du nuage
On suppose que l'effondrement du nuage s'effectue dans des conditions telles que la relation entre énergie interne U et énergie potentielle gravitationnelle EP établie en 1.2.3 reste valable.
De plus, on néglige désormais le terme de pression de surface.
1.3.1 L'effondrement du nuage d'hydrogène atomique s'arrête lorsque la séparation entre les atomes atteint une valeur a, dont on donnera un ordre de grandeur. Quelle relation peut-on écrire entre a, le rayon final Rf du nuage et sa masse M ?
1.3.2 On note Ri le rayon du nuage au début de l'effondrement. On note Ti et Tf les températures initiale et finale du nuage, supposées uniformes. Etablir la relation qui lie Ri, Rf, Ti et Tf. Montrer qu'elle se réduit à une relation entre Rf et Tf, moyennant deux approximations, que l'on précisera.
1.3.3 En déduire l'expression de la température finale du nuage Tf. en fonction de sa masse M et de a. Quelle est la masse maximale que peut avoir un nuage pour que sa température ne dépasse pas 105 K? Quelle est d'après vous la nature du corps ainsi formé ?
1.3.4 Justifier que si Tf. peut atteindre une valeur supérieure à environ 105 K, le gaz constituant le nuage s'ionise.
1.3.5 Le gaz ionisé peut alors subir une nouvelle phase d'effondrement, qui s'achève, au plus tard, lorsque la distance moyenne entre les protons et les électrons est de l'ordre de la longueur d'onde de de Broglie des électrons, λe = h /meve , où ve est la vitesse moyenne d'agitation thermique des électrons. Exprimer λe en fonction de la température Te atteinte à la fin de la compression.
1.3.6 En déduire l'expression de la température finale du nuage Te en fonction de sa masse M.
Quelle est la masse minimale de nuage permettant d'atteindre une température de 107 K?
Quelle est d'après vous la nature du corps ainsi formé
Deuxième partie : Structure des étoiles
Lors de la plus grande partie de son existence, une étoile évolue très lentement, si bien que les distributions de masse, température, pression,... qui la caractérisent, peuvent être calculées en supposant qu'il y a constamment équilibre. De plus, toutes ces distributions sont à symétrie sphérique. Les six fonctions radiales représentant les distributions de température T(r), de pression P(r), de masse m(r), de masse volumique ρ(r), de taux de production d'énergie par unité de masse, ε(r), et de luminosité L(r) d'une étoile sont couplées par six équations. Elles sont très générales et applicables à des étoiles de masses variées. Elles nous permettront de vérifier que la masse d'une étoile est le paramètre dominant de sa structure.
2.1 Ordres de grandeur
2.1.1 Comment s'exprime la puissance reçue par unité de surface sur Terre, E, en fonction de la puissance (ou luminosité), L, rayonnée par une étoile située à la distance D de la Terre. Calculer E dans le cas le Soleil. On rappelle que la distance moyenne Terre-Soleil est de 150 millions de kilomètres.
2.1.2 En bonne approximation, une étoile de luminosité L et de rayon R rayonne comme un corps noir de température Teff, appelée température effective de l'étoile. Rappeler la relation liant ces trois grandeurs sans démonstration. En déduire la température effective du Soleil.
2.1.3 On appelle temps de Kelvin-Helmholtz, noté tKH, le temps nécessaire pour qu'une étoile rayonne toute son énergie potentielle gravitationnelle, en supposant que sa luminosité reste constante. Calculer tKH, pour le Soleil (en supposant que sa masse volumique est uniforme).
2.1.4 On appelle temps nucléaire, noté tn, le temps nécessaire pour qu'une étoile rayonne une fraction donnée f de son énergie de masse, en supposant que sa luminosité reste constante.
Calculer tn pour le Soleil en prenant f = 10-3 et le comparer à tKH, Que peut-on en conclure sur l'origine probable de l'énergie rayonnée par les étoiles ?
2.2 Les équations d'équilibre
2.2.1 Donner les expressions de dm/dr et de dP/dr qui définissent respectivement la distribution de masse et l'équilibre mécanique de l'étoile.
2.2.2 Etablir l'équation d'équilibre énergétique qui lie la puissance produite par unité de volume,
ε(r)ρ(r), à la puissance L(r) qui traverse la sphère de rayon r vers la surface de l'étoile.
2.3 Les équations d'état
On suppose pour simplifier que la matière de l'étoile est totalement ionisée et de composition uniforme. L'étoile est donc constituée d'un mélange de particules massives (noyaux et électrons) et de photons. En outre, la densité est assez faible pour que les électrons, les noyaux et leur mélange se comportent comme des gaz parfaits.
2.3.1 On note xi la fraction de masse de l'étoile due aux noyaux de type i, de numéro atomique zi et de masse mi. On pose µi = mi/ mp et µ. = M/Nmp, où M est la masse de l'étoile et N le nombre de nombre de particules massives qu'elle contient. Etablir que
$\mu { ^{ - 1}} = \sum\limits_i {\frac{{{x_i}(1 + {z_i})}}{{{\mu _i}}}} $ (2)
2.3.2 Les noyaux présents sont principalement de l'hydrogène (fraction de masse X ), de l'hélium (fraction de masse Y) et des traces d'éléments plus lourds (fractions de masse Zi >> X, Y). On supposera que pour tous les éléments lourds le rapport µi / zi est voisin de 2. Justifier cette approximation et exprimer µ en fonction de X et Y. Calculer µ pour le Soleil (on prendra X = 0, 56 et Y = 0, 41).
2.3.4 Etablir que la pression du gaz parfait de particules massives, notée Pg(r), satisfait à l'équation d'état
${P_g}(r) = \frac{{\rho (r)}}{{\mu {m_p}}}kT(r)$ (3)
2.3.5 On note Cv et Cp les capacités thermiques molaires respectivement à volume constant et à pression constante du gaz parfait. On rappelle que Cp - Cv = R et l'on note γ = Cp / Cv.
Etablir que lors d'une transformation adiabatique, un gaz parfait de température T, de pression Pg et de masse volumique ρ satisfait aux relations :
${P_g}{\rho ^{_\gamma }} = cste$ et ${\left( {\frac{{dT}}{{d{P_g}}}} \right)_{ad}} = \left( {\frac{{\gamma - 1}}{\gamma }} \right)\frac{T}{{{P_g}}}$ (4)
2.3.6 Le gaz de photons, en équilibre à la température T, suit la loi de rayonnement du corps noir, c'est-à-dire que sa densité volumique d'énergie dans la bande de fréquences (ν, ν + d ν ),
notée uν, obéit à la loi de Planck
${u_\nu } = \frac{{8\pi h{\nu ^3}}}{{{c^3}}}{({e^{h\nu /kT}} - 1)^{ - 1}}$ (5)
Calculer la densité volumique totale d'énergie du gaz de photons, ur(T).
On posera σ = 2π5k4/15h3c2 (constante de Stefan) et on donne
$\int_0^\infty {\;{x^3}({e^x} - 1)dx = } \frac{{{\pi ^4}}}{{15}}$
2.3.7 On admettra que la pression du gaz de photons Pr. est donnée par
${P_r} = \frac{{4\sigma }}{{3\,c}}{T^4}$ (6)
Vérifier l'homogénéité de cette relation.
2.4 Transport de l'énergie
L'énergie produite par les réactions nucléaires dans es régions internes de l'étoile peut être transportée vers la surface par deux mécanismes : le rayonnement et la convection. Nous considérerons le transport par convection comme négligeable. Cette approximation est bien justifiée pour les étoiles plus massives que le Soleil, mais plus discutable pour les étoiles de faible masse.
2.4.1 On note κ le coefficient d'absorption de la matière stellaire, supposé indépendant de la fréquence : un photon parcourant une longueur dl dans une région de masse volumique ρ a une probabilité proportionnelle à κρdl d'être absorbé. Exprimer la probabilité P(l) qu'a le photon de parcourir une distance l sans être absorbé.
2.4.2 En déduire le libre parcours moyen l0 d'un photon, c'est-à-dire la distance moyenne parcourue avant absorption. Que vaut-il dans le Soleil (on prendra κ = 0, 04 m2 kg-1 et on supposera une densité uniforme) ? En déduire qu'il est justifié de considérer que chaque élément de volume de l'étoile, situé à la distance r du centre, rayonne comme un corps noir de température T(r).
2.4.3 Soit un élément de surface dS situé à la distance r du centre de l'étoile et perpendiculaire à la direction radiale. Calculer le flux net d'énergie FdS traversant dS vers la surface de l'étoile.En déduire que la puissance transportée par rayonnement vers la surface de l'étoile est
$L(r) = - \frac{{64\sigma \pi }}{{3\,\kappa \rho }}{r^2}\frac{{dT}}{{dr}}{T^3}$ (7)
2.4.4 Au voisinage de la surface du Soleil, ρ ~ 10-3 kg m-3, T ~ 6000K et (dT/dr) ~ -4 x 10-2 K m-1, quelle y est la puissance transportée par rayonnement ? Conclusion.
2.5 Les modèles homologues
On admet que le coefficient d'absorption peut se mettre sous la forme κ = κ0ρT -7/2 et que le taux de production d'énergie par unité de masse (dû aux réactions nucléaires) s'exprime par ε = ε0PT n, où κ0 et ε0 sont des constantes, qui ne dépendent que de la composition chimique de l'étoile. On suppose connues les distributions P0(r), T0(r), ρ0(r), m0(r), L0(r) d'une étoile de masse M0 et de rayon R0. On appelle étoile homologue une étoile de masse M1, de rayon R1 et de même composition chimique uniforme telle que
$\forall \alpha \in [0,1]\quad \quad {m_1}(\alpha {R_1})/{M_1} = {m_0}(\alpha {R_0})/{M_0}$
2.5.1 Exprimer ρ1(αRl) en fonction de ρ0(αR0), M0, M1, R0 et R1.
2.5.2 Etablir de façon analogue les liens qui existent entre les distributions P1(r) et P0(r), T1(r) et T0(r). On distinguera le cas des étoiles dominées par la pression gazeuse Pg et celui des étoiles dominées par la pression de radiation Pr. Pourquoi exclut-on les cas intermédiaires ?
2.5.3 En utilisant les deux relations faisant intervenir la luminosité (voir 2.2.2 et 2.4.3), établir les deux expressions liant L1 et L0 pour chacun des deux types d'étoiles (pression gazeuse dominante ou pression de radiation dominante).
2.5.4 En déduire que, pour chaque type d'étoiles, le rayon de l'étoile s'exprime comme une loi de puissance de sa masse (relations dites masse-rayon).
2.5.5 Etablir de même les relations dites masse-luminosité qui expriment la luminosité d'une étoile en fonction de sa masse.
2.5.6 Comparer les relations R(M) et L(M) ainsi obtenues aux diagrammes expérimentaux (voir Figure 1) en prenant n = 5 pour les étoiles plus froides que le Soleil et n = 18 pour les étoiles plus chaudes que le Soleil).
Figure 1: Corrélations masse-rayon et masse-luminosité observées.

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